Alors que Nunamae a soufflé sa troisième bougie cette année, j’ai émis le souhait de partager avec vous un bout de mon parcours d’entrepreneure. Comme vous vous en doutez, il est parsemé de belles rencontres, de déceptions, de jolis succès, de remises en question, et bien sûr, de beaucoup de travail. Avec cet article, je souhaite vous convaincre que si vous en avez l’envie et l'abnégation, vos projets peuvent non seulement voir le jour, mais aussi devenir votre quotidien à 100%. On fait connaissance ?
Je m'appelle Mariana Figueiredo, j'ai 35 ans. Je suis née à Caldas da Rainha, une petite ville de la côte portugaise au nord de Lisbonne. J'ai rejoint la capitale avec ma famille à l'âge de 7 ans, et j’y ai vécu jusqu’à mes 15 ans.
Caldas da Rainha, est une ville artistique très connue grâce au célèbre céramiste Bordalo Pinheiro, dont vous connaissez certainement les pièces en forme de légumes et de fruits. C’est ici, qu’après avoir terminé le lycée, j'ai décidé d’étudier la décoration d'intérieur à l'École des Arts et du Design.
Lorsque j’ai obtenu mon diplôme en 2011, le Portugal traversait une grave crise économique et il n'y avait pas beaucoup d’offres d'emplois pour ceux qui voulaient entrer sur le marché du travail. Un an plus tard, je décide de quitter le Portugal pour Paris. À l'époque, je ne voulais pas exercer ma profession, je ne me voyais pas travailler comme architecte d'intérieur. Je voulais apprendre le français et gagner de l'argent pour pouvoir voyager. Je sentais que j'avais besoin de voir différentes cultures, d'explorer un peu le monde. J’ai donc travaillé comme “Au pair” pour apprendre la langue et financer mes voyages.
Quel a été ton parcours professionnel avant de lancer Nunamae ?
Je n’ai pas eu un parcours linéaire. Pendant plusieurs années, je n'ai pas su ce que je voulais faire, ce qui pourrait me rendre vraiment heureuse et épanouie.
La perte de ma mère, emportée par un cancer fulgurant en 2007, a renforcé ce sentiment d’être perdue. Il y avait quelque chose à remplir en moi, mais je ne savais pas quel était le chemin à suivre.
En 2013, je me suis rendue en Turquie, où j'ai vécu pendant 9 mois, dans le cadre d'un projet de volontariat. Puis, j’ai continué à voyager pendant deux ans, avant de rentrer à Paris. Cela m'a permis de découvrir le monde et de me découvrir moi-même d'une manière différente. Cela a changé ma mentalité.
En 2018, je suis de retour à Lisbonne. Jusqu’à la création de Nunamae en 2020, j'ai eu des emplois d'assistante de direction, de chef de projet dans une entreprise de marketing digital, j'ai créé une marque d’artisanat portugais et j'ai aussi travaillé en tant que responsable d’achats dans une entreprise de design.
Je suis très fière de mon parcours, car je sais que je suis là où je dois être aujourd'hui grâce à tout ce que j'ai fait et appris au cours de ces années là.
Combien de temps s’est-il écoulé entre le moment où tu as commencé à penser au projet Nunamae et le moment où tu t’es lancée ?
En fait, cela n'a pris que quelques mois. Je venais de vendre un autre projet d’artisanat en mars 2020, et je ne pensais pas vraiment à créer à nouveau une marque. Mais quelques semaines plus tard, j'ai commencé à me dire que j'aimerais sincèrement réaliser quelque chose qui ait du sens. J'avais en tête production d'un produit durable, local, fabriqué avec conscience et de qualité. Les idées étaient nombreuses et toutes très différentes les unes des autres.
Lorsque j'ai finalement décidé de lancer ma marque de tapis, six mois se sont écoulés jusqu'au lancement du site web. Le processus a été rapide, et mon investissement à l'époque était de 300 euros ! J'ai fait moi-même le site web et les premières photos ont été faites à la maison. Toute la partie branding a été faite par mon petit ami. Au niveau du stock, je n'ai travaillé que sur 3 tailles, et deux couleurs : le beige et l’écru. J'ai acheté une unité de chacune des petites tailles (qui étaient les prototypes) et j'ai lancé le site web. Je ne voulais pas prendre trop de risques, j'avais peur que ça ne marche pas. Nous étions en pleine pandémie et tout était incertain. De plus, j'avais à ce moment là un travail à temps plein et Nunamae est né dans le but d'être un projet à temps partiel.
Le financement a-t-il été un problème ?
Non, car à part l'achat des prototypes validés, le domaine du site, l'impression des étiquettes, et la redevance mensuelle du site, tout a été fait par mon petit ami à l'époque, et moi. Cela m'a permis de réaliser de grosses économies.
De quoi souffre-t-on le plus lorsqu’on monte une entreprise ?
Je pense que le plus gros problème quand on crée une entreprise pour laquelle nous sommes seul à travailler, c'est la solitude. Même si l’on est en contact avec beaucoup de partenaires, de fournisseurs et de clients, ce sentiment est celui qui occupe le plus de place.
Lorsqu'une question se pose, en termes d'investissement ou de créativité, il n'y a évidemment pas d'équipe pour faire un brainstorming. Il faut également être un très bon gestionnaire de son temps, et maîtriser l'emploi du temps en prévoyant des activités en dehors du travail afin de pouvoir socialiser avec d'autres personnes.
Tes conseils pour préserver sa santé mentale quand cela devient difficile ?
Au début de l'année 2021, j'ai fait un burn-out, parce que je travaillais à plein temps et Nunamae était en pleine croissance. Nous étions également confinés, et je m’occupais de mon fils à la maison en parallèle de mes deux activités.
C'était une période très difficile car Nunamae en était à ses débuts et se développait. Je savais que je devais faire un choix et qu’il fallait suivre le chemin qui me rendrait heureuse et épanouie.
En mai, j'ai quitté mon emploi pour me consacrer à 100% à Nunamae. Depuis, je fais attention à ma santé mentale et physique. Ce n'est pas toujours facile, surtout lorsqu’on travaille dans une petite entreprise où tout dépend de nous. J'ai l'impression que nous passons souvent nos journées à résoudre des problèmes et des situations à la dernière minute, ce qui peut être frustrant et mentalement épuisant.
Personnellement, je fais de l'exercice physique, de la musculation et du pilates. J'ai également décidé de consulter un psychologue une fois par semaine (ce que nous devrions tous faire) et, cette année, j'ai décidé de suivre des séances d'hypnothérapie, ce qui est incroyablement bon et m'a permis de constater rapidement une différence dans mon état émotionnel, physique et même créatif.
J'ai également appris à passer du temps seule à lire ou à méditer, ce qui me fait beaucoup de bien. Il est essentiel d'avoir du temps pour soi, ainsi que pour sa famille et ses amis, et pour cela il est essentiel d'avoir une excellente gestion de son temps.
Quelle est ta plus belle réussite ?
La réalisation de ce projet est ma plus grande fierté et ma plus grande réussite. Je n'aurais jamais pensé créer quelque chose qui me permettrait de quitter mon emploi principal 8 mois seulement après son lancement. Je l'ai fait parce que je ressentais le besoin d’exploiter ma facette créative et ma passion pour la décoration. J'ai travaillé avec mon cœur et mon intuition.
Comment gères-tu tes victoires, mais aussi tes doutes ?
Côté victoires, j'ai un premier moment d'excitation et de joie comme un petit enfant lorsqu'il reçoit un nouveau jouet. En réalité, je suis très reconnaissante des opportunités qui se présentent à moi. J'analyse toujours ce qui a été fait pour qu'elles se produisent dans ma vie.
Quant à mes doutes, j'ai appris à les gérer avec le temps. Aujourd'hui, je ne les laisse plus m'angoisser. Bien souvent, le temps est mon meilleur ami.
Comment gérer son temps quand on fait tout de A à Z ?
Le week-end, généralement le dimanche soir, j'organise mon emploi du temps pour la semaine suivante. Le matin, j'essaie toujours de faire les tâches prioritaires : réunions, prospection commerciale. Et l'après-midi, je me consacre à la partie créative.
Chaque semaine, j'ai des imprévus, et j'essaie toujours de les intégrer à ce qui est déjà prévu dans l'agenda.
Quelle partie de ton activité préfères-tu ?
La partie qui me fait le plus de plaisir est la partie créative, la découverte de nouveaux artisans et de nouvelles techniques. Le Portugal est riche en artisanat, et chaque région a sa propre tradition. J'aime voyager à travers le pays et visiter leurs ateliers, discuter avec eux, apprendre leurs histoires et collaborer main dans la main sur les différents projets.
Les conseils à prodiguer à quelqu’un qui souhaite se lancer ?
1/ Vous n'avez pas besoin d’avoir de nombreuses années d'expérience
2/ Commencez avec très peu
3/ Les peurs des autres ne sont pas les vôtres
4/ Un projet que vous créez est une partie de vous que vous libérez dans le monde
5/ Le succès est fait d'erreurs et de victoires
6/ Soyez cohérent chaque jour
7/ Faites ce qui vous rend heureux